SAGELAT
Plus de dix ans après l'expérience menée par Célestin Freinet*, sur les collines du pays vençois,
sauf erreur, les élèves de Sagelat de la génération 1949/1956 ont du
sortir de la cour de l'école, en tout et pour tout, trois fois**.
La
première pour aller à quelques 150 mètres de là voir l'excavation
réalisée, vers 1850, dans le flanc collinaire sous le cimetière, pour
extraire le matériau nécessaire pour élaborer le mortier indispensable à
la construction du viaduc dit de Fongauffier.
La deuxième fut pour illustrer le système métrique.
Une succession de porteurs de panneaux décamétriques de fortune, le
long du C.D n° 53 en remontant sur la droite, vers le bosquet disparu,
entre Rouchy et le bas de Talissat, représenta un hectomètre soit le
dixième du kilomètre.
La troisième et dernière fut la démonstration de la première planteuse à tabac*** qui a eu lieu dans un champ à la Robertie. Cela devait être en mai/juin 1954.
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Les
temps, heureusement, pour tous, ont bien changé et si la méthode
Freinet n'a pas vraiment séduit les décideurs de l'éducation nationale, dont bien peu ont du donner quelques années de leur vie à l'enseignement primaire,
les élèves de notre temps acquièrent leurs connaissances en travaillant
dans les salles de classe, certes, mais aussi en complétant cette
appropriation du savoir par l'éveil ; que ce soit en visitant des sites
remarquables comme le Pont du Gard, Nimes, la Venise languedocienne, ou, plus proche de nous, Cadouin.
Manuelle Sentis,
il y a deux ans, a voulu familiariser les élèves en les impliquant à
une recherche de connaissance sur la Nauze ; celle-là a permis de
rédiger le superbe opuscule "Mon ruisseau".
Cet
éveil sur l'environnement qui les touche de près c'est, un peu, faire
découvrir un patrimoine d'une richesse insoupçonnée qui se situe à
portée de leurs yeux et qu'ils risquent, s'ils n'y sont invités, de ne
pas prendre le temps de regarder.
Notre Val de Nauze où se lovait, il y a deux mille ans, une voie romaine reliant Vesunna (Périgueux) à Divona Cadurcorum (Cahors), mérite bien une petite attention. Un village chargé de plusieurs milliers d'années d'histoire depuis le Sauveterrien, période du Mésolithique, ne doit pas sombrer dans l'oubli.
Notre
entrelacement réticulaire de chemins ruraux, connexions multiples de
nos reliefs et de nos vallons, vaut bien un petit regard. Nos
pigeonniers, nos puits et nos fontaines méritent bien une attention ;
surtout eu égard à nos ancêtres qui les ont érigés ou sauvegardés.
Tout
ces décors, que tant d'écoliers ont côtoyés ou, parfois, simplement
effleurés, sont et seront les thèmes que Manuelle et Michèle vont
valoriser.
Le premier parcours pédagogique de l'année. Vendredi
6 septembre la canicule, au milieu de la journée, persiste. Pour
effectuer ce timide et premier parcours pédagogique de l'année les
écoliers se sont munis de gourdes d'eau.
La
marche sera modeste ; environ 3 Km pour l'aller et retour. Elle
connaîtra une demi-douzaine d'escales pour observer la nature, le site
de l'église, une fontaine asséché, un lit de ru tari, deux pigeonniers,
le vallon de Lescabanes où un ru a totalement disparu, une
fontaine-lavoir et enfin le petit chemin rural conduisant à la Nauze, en grande souffrance après les mois de sècheresse, au niveau du Moulin de Gamot.
Les
écoliers ont découvert les panneaux indiquant les lieudits des
environs, la Braude, le Maillac, Pétrou, les Champs du Colombier,
Bugou, la Braude, la Poujade. Tous ces toponymes signent notre toute
petite histoire.
Les
élèves ont écouté et appris. Certains de leurs propos ont révélé de
très belles perspicacités ; surtout pour découvrir la racine des
toponymes.
Ne doutons pas qu'ils tirent parti de la découverte de leur milieu.
D'autres "échappées instructives"
devraient compléter cette première promenade pédagogique. Citons les
premières. Fonpasserelle, Le Bloy, Pétrou, Fonfroide, Pessarni sans
oublier, naturellement, une exploration du bourg de Fongauffier.
Bravo
Manuelle vous êtes, avec Michèle Bard l'enseignante de la classe des
plus petits, les superbes éclaireuses de nos jeunes têtes qui plus tard,
espérons le, sauront être fières de vous.
Pierre Fabre.
Célestin et Élise Freinet deux serviteurs émérites de l'éducation que la République n'a pas su protéger et, encore moins, honorer.
*
Célestin Freinet est né en 1896 dans le petit village de Gars [Alpes
maritimes] et mort à Vence en 1966. Il a poursuivit ses études à
Grasse, école primaire supérieure, et à l'École normale
d'Instituteurs de Nice.
Il
passe son enfance à la campagne et gardera des traces de cette période
en donnant de l’importance à la société traditionnelle et à certaines
valeurs transmises. On retrouve cet intérêt dans "Les dits de Mathieu"
où il fait parler un berger qui partage ses réflexions... entre la
poésie et le bon sens... Paysan, philosophe, poète, Freinet va lutter de
toutes ses forces pour l'éducation.
Comme
certains pédagogues, il n’aime pas l’école mais, néanmoins, il en est
le chantre. Inspirons nous de sa plus belle citation ; Ce n’est pas avec des hommes à genoux qu’on mettra la démocratie debout ! Célestin Freinet.
**
Les écoliers du C.M et de F.E, en principe, les mercredis et les
samedis, si le naturel du maître d'école le permettait, sacrifiaient la
courte récréation de l'après midi pour aller de l'école du bourg de
Fongauffier, à l'époque sise en bordure de la R.N 710, dite la grande
école, rejoindre l'école, dénommée la petite école, qui était où se
trouve celle de nos jours. C'était surtout pour confier les grands
élèves au soin de l'institutrice pour le chant. Il fallait bien préparer
les grands susceptibles d'avoir à chanter lors du certificat d'études.
Cette
sortie, une forme de licence et de relâchement, était purement et
simplement annulée si le maître d'école la jugeait inopportune.
***
Le souvenir de cette démonstration de moins d'une heure a pu laisser
aux élèves observateurs une démonstration plus éloquente du taylorisme
qu'une conférence de management.